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─ Yunnan Fu est sur la Voie du Jade. Cette précieuse pierre nous vient de la Haute Birmanie mais aussi du Sin-Kiang. Notre ville a son quartier de polisseurs de jade. Les meilleurs au monde certainement. Il arrive à certains de nos tailleurs d'observer les plus belles pierres pendant plusieurs années. C'est de cette longue contemplation que viendra le premier coup de ciseau, de jade bien sûr, qui décidera de la forme du bijou. Puisque vous semblez intéressé, je vais vous montrer quelque chose.
Il se lève, se dirige vers un meuble fermé par un imposant cadenas, l'ouvre et revient avec un coffret de bois laqué. Frédéric n'a pas le temps d'en contempler le motif car Louo Leang en a déjà soulevé le couvercle, découvrant un alignement de bijoux déposés sur une soie précieuse : sept objets en jade et une perle. Il commence une énumération comme s'il lisait les pages d'un catalogue ou d'un inventaire, en marquant pour chaque objet une longue pause afin que Frédéric puisse le contempler à loisir :
─ Le premier est un anneau de mandarin, vous le connaissez…
─ Le second est une tablette en forme d'anneau portant gravée une feuille de jonc. Elle me fut offerte par l'Empereur lui-même…
─ Le troisième, un sceau, sombre comme l'eau profonde d'un lac de montagne…
─ Le quatrième, une boucle d'oreille, une larme de Kuan Yin, la déesse de la Bonté...
Il prit le cinquième dans le creux de sa main et l'exposa à la lumière du jour :
─ C'est une cigale, admirez le vert feuille de bambou. On la placera sur ma langue. Lorsque je serai mort, bien sûr ! s'exclama-t-il en riant. L'ancienne coutume veut que l'on dépose dans les neuf ouvertures du corps d'un illustre défunt des objets de jade, pour le préserver de la putréfaction. Ils conservent à l'intérieur le précieux souffle de vie.
Les larmes du buffle (extrait) pages 172-173
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